Avant le Royaume des Chats, patatra !
Et s’il vous arrivait, vous aussi, de devenir (malgré vous) l’héroïne ou le héros d’un jour ? Beaucoup de compassion et une pointe de courage suffisent pour transformer le quotidien morne en aventure rocambolesque et féerique. C’est ce qu’il arrive à Haru Yoshioka, lycéenne ordinairement banale, qui vit l’un de ces jours où l’on soupire : « j’aurais mieux fait de rester chez moi ! » Jugez plutôt : Haru se réveille en retard malgré la sonnerie du réveil. Pas le temps d’avaler le délicieux petit-déjeuner ; Haru court, court à en perdre une chaussure ! Hélas, elle arrive en retard. A-t-elle récupéré sa chaussure ?
Pas le temps de se soucier du soulier, le cours a déjà commencé. Haru se faufile avec toute la souplesse d’un corps à jeun réveillé trop vite. Elle se cambre, certaine de ne pas avoir été vue. Le professeur est de dos, occupé avec son tableau. Les élèves sont assis, penchés dans leurs cahier. Mais non, Haru est repérée. Le professeur se retourne sans même adresser un regard à la retardataire : « va vite à ta place au lieu de te cacher ! » Les autres élèves pouffent. Haru masque sa gêne et file à sa place. Une gêne d’autant plus grande que Machida, le camarade de classe dont est secrètement amoureuse, se moque aussi d’elle… Il ne s’agit bien sûr pas de notre cher Hajime Machida !
Rencontre avec sa Miajesté
Haru quémande une pause sur la terrasse de son lycée. Mais un drame survient encore, en forme de ballon lui tombant sur la tête. « J’en ai marre ! », lance Haru à la fin de sa rude journée de lycéenne. Le réconfort de son amie laisse la laisse dubitative : « […] Il t’arrivera certainement quelque chose de pire… »
Alors qu’Haru et son amie rentrent des cours, elles croisent la route d’un élégant chat gris, qui traverse la chaussée. Mais le feu passe au vert; voitures et camions démarrent au quart de court. N’écoutant que son amour du prochain, Haru bondit sur la voie sauver le chat… Un chat peu ordinaire. C’est un prince, et pas n’importe lequel. Haru a sauvé le prince Loon, fils de sa Miajesté le Roi des chats. Haru est spécialement invitée par sa Miajesté au Royaume des chats, pour recevoir son précieux présent… Voici donc notre héroïne banale transportée dans un monde pas banal où elle fera des rencontres tout aussi extraordinaires, notamment celle de Baron et de Muta…
Royaume des Chats, royaume heureux
Fin du mois avec le très fantasque et joyeux film d’animation Le Royaume des Chats. A l’origine, バロン・猫の男爵 (Baron – Neko no Danshaku / Baron, le chat baron) un manga (one-shot) de Aoi HIIRAGI paru au Japon en 2002. Publié chez l’éditeur japonais Takuma Shoten, le manga est encore inédit en France. C’est aussi en 2002 que sort le film 猫の恩返し, (Neko no ongaeshi – La gratitude du chat), adapté du manga d’Aoi HIIRAGI. Le film, signé Ghibli, est réalisé par Morita HIROYUKI, et scénarisé par Reiko Yoshida. Les jolies musiques sont l’œuvre de Yuji NOMI. Le film d’animation sort en France en 2003. C’est aussi en 2003 que parait la version française du livre signé Aoi HIIRAGI, Morita HIROYUKI et Hayao MIYAZAKI (édition Takuma Shoten pour la VO; Milan pour la VF).
Ce n’est pas la première fois que le studio Ghibli adapte une oeuvre d’Aoi HIIRAGI. En 1995, feu le réalisateur Yoshifumi KONDO adapté le shôjo manga 耳をすませば (Mimi o sumaseba / Si tu tends l’oreille, disponible sur Netflix). Hayao MIYAZAKI est au scénario. C’est dans cette œuvre que l’on verra pour la première fois Baron et Muta…
Le Royaume des Chats et l’école de la vie
Voilà un film d’animation où le second degré, l’humour et la joie ont toute leur place. On est tout de suite transporté dans le quotidien de Haru. Tout invite à l’aventure joyeuse. Le Royaume des chats est un très joli film familial et bienveillant. C’est aussi un film initiatique, qui nous fait voir la banalité du quotidien sous un angle nouveau. Tout est toujours possible. Après la pluie, le soleil. Mais la pluie est également utile. Elle rafraîchit et fait pousser les plantes. Elle nourrit, en début et en bout de chaîne.
Le Royaume des Chats plaira bien sûr à tous les amoureux et toutes les amoureuses des chats, mais pas que, bien sûr. Inutile de s’y connaître en champ lexical félin pour apprécier les aventures de nos amis.
Le Royaume des Chats nous apprend à y regarder à deux fois. Ce que l’on voit de prime abord comme le théâtre de l’oisiveté et de la paresse luxueuse laisse entrevoir des fissures lorsqu’on le regarde avec plus d’attention. Et les difficultés du monde, alors ? Puisque la vie n’est pas facile, pourquoi ne pas chercher de petits bonheurs dans le quotidien ? Un quotidien simple, banal, parfois répétitif, qui, loin de lasser, tisse un cocon sécurisant. C’est de tout ça dont nous parle Le Royaume des Chats. Un film résolument lumineux que l’on revoit avec envie.
Un jour avec Baron
Voici un fait divers bien réel, qui enchanta mes froides nuits d’hiver. C’était l’époque où, étudiante, je rentrais des cours. Une marche nocturne dans la froideur et le silence de la nuit, avec pour compagnon… un chat. Un élégant chat blanc qui m’attendit un soir à l’entrée de mon quartier. Je le surpris, à moins que cela ne fut le contraire. Sans un mot, l’élégant chat me fit traverser le quartier, me conduisant jusqu’à ma chambrette. Je pris l’affaire pour une coïncidence. Il devait certainement effectuer quelque ronde de nuit. Mais l’affaire se répéta tous les soirs, et je pris l’habitude de cheminer avec mon ami le chat. Je l’appelai affectueusement Baron, en référence au très élégant Baron du Royaume des chats.
Hélas, les vacances d’hiver marquèrent la fin de mes examens. Je restai chez moi et ne sortis plus. La séparation ne dura que quelques jours, tout au plus. Peut-être une semaine, peut-être un peu plus… Concentrée dans la préparation des cours du prochain semestre (soyons honnêtes : je lézardais), il ne me vint même pas à l’esprit de sortir prendre des nouvelles de Baron. La rentrée scolaire vint, et je rentrais encore le soir. Mais Baron, lui, n’était plus là. Je ne le revis plus jamais. J’en ressentis une grande culpabilité. Méchante étudiante, la tête fourrée dans les cahiers au lieu de se soucier de son prochain ! J’essayai de le retrouver, en vain. Baron avait-il déménagé ? M’en voulait-il ?
Je me console aujourd’hui en pensant qu’il doit être bien heureux, quelque part, et que l’on s’occupe bien de lui, tout comme lui s’occupait si bien de son prochain.
Les infos en plus
Studio Wild Side Video – Le Royaume des Chats
Générique de début et de fin du Podcast : Hands of the wind, de Manuel Delsol.