Après la rétrospective dramanganime de 2023 donc place au pas vers l’autre, et aussi vers nous-mêmes, à travers deux mangas très doux qui parlent à toutes et tous : Sans aller à l’école, je me suis fait des amis, et Le chemin de l’amitié.
Comment se faire des amis ? L’histoire de Masatono
Sans aller à l’école, je me suis fait des amis (2020, Futabasha, 2023, Akata) est un manga en un tome de TANAZONO Syoichi. Il fait suite à Sans aller à l’école, je suis devenu mangaka (2014 Futabasha, 2016, Akata) manga en un tome également où l’auteur raconte son enfance difficile après avoir subi la violence d’un enseignant.
Les deux volets de cette œuvre sont autobiographiques. L’auteur se raconte à travers Masatono, garçon à l’enfance classique, jusqu’à ce jour de primaire où son professeur le gifle violemment (Sans aller à l’école, je suis devenu mangaka). Traumatisé, l’enfant ne peut plus d’aller à l’école. Ses parents essaient de l’aider, mais le temps passe et l’enfant est toujours déscolarisé. Les professeurs à domicile se succèdent. La compassion des premiers jours fond dans l’incompréhension et les reproches. La violence du professeur est minimisée. L’angoisse de Masatono est perçue comme exagérée. L’enfant lui-même se trouve anormal et tente à plusieurs reprises de retourner à l’école, sans succès.
Le seul rayon de soleil de Masatono, c’est le manga. C’est grâce à sa passion qu’il ira de l’avant. Adolescent, il essaie toujours de s’insérer dans Sans aller à l’école, je me suis fait des amis. Comment se faire des amis ? Hors milieu scolaire, la mission semble impossible. Si le titre laisse penser que Masatono n’a pas du tout été à l’école, il a en réalité fréquenté des écoles spécialisées, qu’il trouve plus adaptées à sa situation.
Masatono réalise en effet qu’il n’est pas fautif, et qu’il n’est pas seul. Il constate aussi qu’il a développé beaucoup d’aprioris sur les gens, estimant telle personne bien trop solaire pour être ami avec lui. Il est ému de savoir que des gens l’apprécient tel qu’il est. Il se remet en question avec beaucoup d’humilité, pour mieux avancer.
Comment se faire des amis ? L’expérience d’Izumi et Yôsuke
Le chemin de l’amitié (Futabasha, 2020, naBan, 2024), est un manga en un tome d’AIZAWA Ikue. Doux et bienveillant le manga s’arrête sur la rencontre entre Izumi, le brun à lunettes, et Yôsuke, le blond. Les deux enfants ne fréquentent pas le même collège, mais se rencontrent sur la route de l’école. Ils se croisent tout d’abord sans s’adresser la parole, avant de finir par briser la glace, un jour de forte chaleur.
Izumi se lance : « un jus de fruits, ça te dit? »
L’histoire aurait pu s’arrêter là. Un jus, un salut. Mais les deux garçons sympathisent immédiatement. Ils s’entendent bien, tout simplement. L’autrice pose un regard très tendre sur ces enfants qui parlent de tout et de rien. Entre deux discussions banales se glissent des sujets plus graves, comme les rêves d’avenir de Yôsuke, ou les comportements de certains adultes, qui minimisent les problèmes des enfants. Les enfants sont bien conscients que les adultes les prennent parfois de haut. Mais tout comme ils ont des tracas d’adultes, les enfants ne pourraient-ils pas avoir leurs problèmes ?
Où se faire des amis ?
On pense d’emblée aux milieux classiques de socialisation : le milieu scolaire, le travail, les clubs de loisirs, d’arts, de sport… Bref : des lieux où des gens se rassemblent, parfois autour de centres d’intérêt communs. Bien sûr, on peut aussi rencontrer de nouvelles personnes au détour d’un chemin, comme dans Le chemin de l’amitié.
L’avantage des cercles classiques de socialisation est qu’ils proposent un vivier d’amis potentiels à disposition. Mais il ne suffit pas d’être dans un groupe pour se faire des amis. D’ailleurs, qu’est-ce qu’un.e ami.e ?
A l’école, les choses se compliquent aussi. Car le lieu cristallise les tensions. Le harcèlement scolaire fait des ravages, avec des répercussions qui dépassent largement le cadre scolaire. Le manque de budget et les classes surpeuplées contraignent les bonnes interactions. La peine est double pour les élèves en difficulté. Pour Masatono, impossible d’instaurer un dialogue dans un contexte pareil. Il aura cependant de bonnes surprises en constatant qu’il était loin d’être invisible aux yeux de tous…
Et les centres d’intérêt ? A priori, on a davantage de chances de se faire des amis dans des clubs et autres groupes fondés sur les intérêts communs. Mais là encore, tout n’est pas gagné d’avance. Confère Masatono et ses débuts laborieux, malgré son intégration dans une école de dessin. A l’inverse, une très belle amitié peut naître de « rien » : c’est ce que nous montrent Izumi et Yôsuke.
Comment se faire des amis ?
Ces exemples montrent qu’ils n’existe pas de recette pour se faire des amis. Dans Le chemin de l’amitié, les deux garçons ont passé un certain temps avant de briser la glace. Et quand ils le font, c’est avec une question banale. Et chacun fait un pas vers l’autre. C’est cette curiosité mutuelle qui les rapprochera. Parfois, le début de la conversation sera plus préparé. C’est, par exemple, le cas d’un élève entrant dans une nouvelle école, questionné par les autres : « où habites-tu ? » « dans quelle école étais-tu avant… ? »
Pour se faire des amis, il faudrait donc aller où ils se trouvent : à l’école, au collège, au lycée, à la fac, dans des centres de formation, au travail, dans un club, sur un forum (ça existe toujours, oui!), des groupes en ligne, des associations, des activités organisées par sa mairie, etc.
Apprendre à s’adapter
L’amitié, c’est faire un pas vers l’autre et laisser l’autre venir vers nous, tout en préservant notre personnalité. Vous êtes timide ? Introverti ? Bavard ? Drôle ? Tout à la fois (c’est possible!). Vous n’allez pas vous renier pour entrer dans tel ou tel cercle social.
Ne confondez pas « adaptation » et « mensonge ». L’adaptation, c’est adopter des « positions de soi » différentes selon les interactions. Le sociologue Norbert Elias développe notamment cette thèse. On n’est pas toujours le même avec ses parents, avec tel membre de la famille, avec tel ami, etc. Il ne s’agit pas d’un mensonge mais d’un mécanisme qui s’opère naturellement, et nécessairement.
Une bonne observation et une bonne écoute vous permettront de mieux cerner votre environnement. Ce sont également des atouts efficaces pour aller vers les autres.
Se faire des amis : et si on lâchait prise ?
Mais comment briser la glace ? Beaucoup d’amitiés avortent à cause de ce rendez-vous manqué. Certes, on espère avoir d’autres occasions. Mais être le premier, la première à amorcer le dialogue peut effrayer. Et si l’autre ne répondait pas ? Et s’il/ si elle répondait mal ? On pense en négatif et on projette du négatif sur l’autre. Parfois, on se dévalorise au point de ne pas s’estimer assez bien pour parler avec telle personne.
Les rendez-vous amicaux manqués peuvent également survenir lorsque l’auto-contrôle est trop grand. L’auto-contrôle, bon camarade avec le perfectionnisme, peut vous faire rater de jolies rencontres. A force de vouloir tout contrôler, vous risquez de tomber dans le mensonge avec les autres et vous-mêmes. Vous construisez une personnalité publique que vous pensez intouchable, mais qui est très fragile.
Comment se faire des amis ? Ce qu’il faut retenir
- Sachez accueillir l’autre
- Soyez bienveillant et indulgent avec vous
- Restez-vous même
- Apprenez à vous examiner (caractère, attitude)
- Travaillez votre écoute active; observez
- Faites preuve de patience
Les infos en plus
- Sans aller à l’école, je me suis fait des amis, éditions Akata
- Le chemin de l’amitié, éditions naBan
- Effets sonores : Zapsplat.com ; Joy SMITH : Joy to the world, jingle bells (Zapslat.com)