Bienvenue dans le monde merveilleux de Kakuo : travail à rallonge, salaire de misère, chambre miteuse, isolement… Une vie de mangaka bien loin du rêve.

Un jour dans la peau de Kakuo

Doraemon, vous connaissez ? Le chat bleu venu du futur… Kakuo, 23 ans, assistant-mangaka en galère, a le même chez lui… Enfin, il expérimente plutôt la cohabitation forcée avec son « lui » du futur. Jugez plutôt : un soir, un type ivre se présente comme étant son « lui » du futur. Il connaît plein d’anecdotes sur Kakuo. Normal, c’est lui. Drôle d’histoire… Les collègues de travail de l’assistant-mangaka lui conseillent de se méfier. Les types louches ne manquent pas. L’histoire du vieil inconnu ressemble plus à une arnaque pour squatter gratuitement le bouge de Kakuo et piocher dans sa maigre caisse.

Kakuo, lui, aimerait bien profiter de son petit salaire d’assistant-mangaka. Il vivote entre échecs et galères depuis 4 ans. Il aimerait bien percer, se faire un nom, un jour, peut-être ? Son double du futur lui conseille d’arrêter. Mangaka n’est pas un métier. Pas un métier pour lui, en tout cas. Le vieil inconnu n’est pas le seul à décourager Kakuo. Ses « collègues » et le mangaka pour qui il travaille le raillent derrière les murs.

Kakuo le sait, mais persévère. N’est-ce pas plutôt de l’entêtement ? Non, car sa persévérance paie. Un coup de fil, une bonne nouvelle, Kakuo va enfin démarrer une série. Pour son patron mangaka, en revanche, c’est rideau : son manga s’arrête. Kakuo est persuadé qu’il va enfin vivre son rêve. Mais c’est le début du cauchemar.

Stand by me Kakuemon, les origines

Voilà un manga qui a beaucoup fait parler de lui. Stand by me Kakuemon est un manga de SATO Shuho, auteur bien connu pour ses succès comme Give my regards to Black Jack, pour ne citer que ce manga. Le manga Stand by me Kakuemon est sorti en 2015 chez Torch, le magazine de prépublication de l’éditeur Leed. En France, le titre est à retrouver aux éditions Meian. Le tome 1 est sorti en février, le 2 est prévu pour le mois de juin. La série est en cours, avec 3 tomes parus au Japon (le rythme de parution est plutôt lent^^). Dans Stand by me Kakuemon, le mangaka veut montrer une face du monde du manga qu’on ne voit pas.

Bokuman, la critique critiquée

Au début, il y a Bokuman. Bokuman se voulait être une critique de Bakuman, le manga du duo Ohba-Obata qui idéalise la vie de mangaka, avec des pointes de sexisme (voilà qui est dit). Les deux compères nous avaient déjà montré ce qu’ils savaient faire en la matière, avec Death note… Leur vision des femmes est assez problématique.

Bakuman, le it criticable

Dans Bakuman, Ohba et Obata nous parlent de 2 liens qui veulent révolutionner le monde du manga. Un monde réduit au Jump, qui zappe totalement ou presque les shôjo manga. Les filles dans Bakuman n’existent pas. Dès le tome 1, les héros disent clairement qu’une fille n’a pas à rêver grand. Qu’importe si elle échoue. Un homme, par contre, doit réaliser ses rêves… Les filles dans Bakuman sont, au choix : bêtes, mais drôles, rêveuses et passives, sans ambition ou une ambition molle… Bakuman nous montre une vision très caricaturale du monde du manga. Avec le sexisme en prime, ah oui, n’ouvrez pas des yeux si grands. C’est très grave. Hélas, Bakuman n’est ni la première ni la dernière série à déraper. Et, encore hélas, il y a pire que Bakuman.

SATO Shuho a essayé de sortir une critique de Bakuman qu’il a ironiquement appelée Bokuman. Hélas, le projet est quasi mort-né (3 chapitres sortis) à cause de pressions que l’auteur aurait subies… Stand by me Kakuemon se veut être la suite du projet.

Kakuo NO romance

L’univers de Stand by me Kakuemon est tout sauf romancé. La vie est dure, pour Kakuo. On pourrait lui dire qu’à son âge (23 ans), il a tout le temps pour se faire un nom. Mais le temps ne nous appartient pas, et il serait bien cavalier de tenir un tel discours devant quelqu’un qui essaie en vain de percer depuis des années.

La réalité, c’est que le manga, c’est une histoire d’argent. Mais là encore, on pourrait faire ça en respectant le droit, les droits de l’homme, ça existe quand même, non ? Pas dans le monde de Kakuo, on dirait. L’arnaque souffle dans l’air, se glisse sous les portes, se planque derrière les pages du manga. On est très loin du rêve.

Un mot sur la mention « pour public averti »

Si le manga est pour public averti, c’est parce qu’il comporte certaines scènes de rapprochements humains TRES DISPENSABLES. C’est le « mauvais point » du manga. « Mauvais », surtout parce qu’il met en scène une assistante, Machiko, qui bosse avec Kakuo, et qui entretient une relation avec le patron mangaka. Quand elle sent le vent tourner, elle se rapproche de Kakuo et… Le jeune homme n’est pas dupe, mais se laisse quand même aller à la joie factice sous les draps.

Le problème, c’est que Machiko est la seule femme du tome. Le seul personnage féminin qu’on nous présente est une femme qui va d’homme en homme, cherchant de qui elle tirerait le meilleur profit. Pourtant, elle aussi dessine. Mais elle n’a pas l’air de vouloir gagner sa vie grâce à son art. Faut-il tout de suite crier au sexisme ? Non, le manga semble bien vouloir nous dire autre chose. Certains diront que Machiko est une fine tacticienne : elle utilise les moyens qu’elle veut pour arriver à ses fins. L’explication pourra convenir aux uns, être trop légère pour les autres… Il reste néanmoins dommage que le seul personnage féminin présent dans ce premier tome ressemble à une caricature de « personnage facile ».

Le réel déformé

Certes, l’on objectera que Stand by me Kakuemon est une critique acide, une caricature. Le manga lève le voile sur un monde du manga dur, cynique, sans pitié. Quelle place pour Kakuo et ses rêves ? En attendant le tome 2, il faut souligner l’implication du mangaka, SATO Shuho. Très engagé, il n’hésite pas à se livrer sur son expérience. Il espère d’ailleurs sensibiliser les jeunes auteurs sur les côtés sombres de la vie de mangaka, et sur l’importance de connaître ses droits.

Les infos en plus

Crédit image : Stand by me Kakuemon couverture du tome 1 © SATO Shuho / 2015 / Leed

Retrouvez Stand by me Kakuemon chez Meian.

Générique du podcast : Hands of the wind, de Manuel DELSOL

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