Matin tranquille à Barbara
Temps ensoleillé. Matin tranquille à Barbara. Aoba se réveille. Mâ prépare des pancakes. Aoba est-elle prête ? Et le lait de chèvre ! N’oublie pas ton lait de chèvre. Taka et Païn débarquent par la fenêtre. L’odeur des pancakes parfume la pièce et le monde ensoleillé. Senri s’est réveillé. Il a toujours son visage doux et apaisé, mais Papy-Tonnerre n’aime pas le voir vagabonder entre ciel et terre. Maman Daïya court pour aller au travail. La vie est belle, mais peut-être plus belle pour certains. Il faut toujours travailler et l’ambiance de travail n’est pas vraiment rêvée. Pas pour tout le monde. Daïya en a assez. Elle rentre énervée et s’en prend à Taka. Qui s’en était pris à Aoba. Qui ignorait que le livre était important pour Taka. Le livre de Senri. Senri confie toujours de jolis trésors.
Les larmes coulent sur les trésors et tout le monde regrette. Le rêve devient un peu triste. Est-ce donc aussi cela, la vie à Barbara ? Mâ rassure Aoba. La vie est vraiment jolie, à Barbara. Dehors, c’est le chaos. Aoba est la précieuse enfant de la lune et des mers. Elle peut vivre ici tant qu’il y aura des pancakes aujourd’hui, à Barbara. Temps ensoleillé et matin tranquille. Aoba se réveille avec l’odeur des pancakes. N’oublie pas ton lait de chèvre. Soleil du matin et temps joyeux. A Barbara vivent les jours heureux.
Retrouvailles froides au Japon
L’enquêteur WATARAI Tokio rentre après 3 ans d’absence. Il se réjouit de revoir Kiriya, son fils. Mais le fils n’a pas l’air aussi emballé. Tant pis, Tokio sera heureux pour deux. Son vieux compère, le docteur Daikoku, tente de briser la glace entre le père et le fils. Il expédie la biographie de Kiriya en quelques phrases. Le père a quitté un enfant. Il retrouve un jeune homme, qui étudie à Tokyo. Tokio veut-il des nouvelles de la mère, Akemi ? Elle va bien. Le docteur Daikoku écourte la discussion familiale : l’enquêteur est attendu en Hokkaido par MOMOTA Tarô et son équipe. Le père s’insurge. Il débarque à peine de l’avion et doit repartir au bout du Japon ? Lui qui se réjouissait de rattraper le temps perdu avec son fils doit donc filer pour une autre mission.
WATARAI Tokio n’est pas un enquêteur comme les autres. Il peut entrer dans les rêves des gens. Ses talents d’analystes de rêves sont très recherchés, et l’homme est sollicité pour enquêter sur des affaires… des affaires criminelles. Kiriya n’est pas emballé par cette nouvelle mission. Son père ferait mieux de refuser. Mais pourquoi cette inquiétude soudaine ?
Hokkaido. MOMOTA Tarô est bien soulagé de voir arriver WATARAI. Lui et son équipe butent sur sombre affaire. Une jeune fille est plongée dans le sommeil depuis ses 9 ans. Voilà maintenant 7 ans que l’enfant dort. C’est un cas inédit de « pseudo-hibernation ». L’enfant a aussi été témoin d’un crime atroce. Est-ce pour cela qu’elle reste endormie ? Tokio accepte d’entrer dans le rêve de l’enfant. Il découvre une île, des gens heureux, une petite fille qui rit, entourée par sa famille et ses chèvres. Barbara. Aoba vit sur l’île de Barbara.
Barbara l’entre-deux mondes, les origines
Barbara, c’est le manga de HAGIO Moto, autrice phare du manga. Au Japon, le titre est sorti en 2002 sous le nom «Barbara Ikai – バルバラ異界 » chez la Shôgakukan. Ikai s’écrit avec le kanji « 異/ i / différent » et « 界/ kai / monde ». On peut donc traduire ce mot par « monde différent ». Vous connaissez sans doute son compère isekai(異世界), où l’on retrouve les mêmes kanji « i » et « kai ». Au milieu, on trouve « 世/ se » pour « monde, société, époque ». Isekai veut dire « monde parallèle ». Ikai désigne tous les univers imaginaires. Le mot « sekai » (世界), veut dire « monde ».
On comprend donc tout de suite que l’île de Barbara ne figure sur aucune carte. Elle est en dehors du temps. L’enquête de WATARAI Tokio commence ici.
En France, le manga est publié chez Akata sous le titre « Barbara – l’entre-deux mondes ». On retrouve ce monde en dehors du temps, avec un lien entre les deux univers : celui qu’on connaît, le monde des humains, et l’autre monde, celui de l’imaginaire. Mais lequel est le vrai monde ? Au Japon, le shôjo manga Barbara est achevé en 2 tomes. Le tome 1 est sorti en France en janvier, chez Akata. Le tome 2 est prévu pour juin.
Joli présent
Pour la sortie du tome 1, les éditions Akata et HAGIO Moto nous avaient préparé une bien jolie surprise. Invitée d’honneur au dernier festival d’Angoulême, l’autrice a signé de très jolis ex-libris offerts pour l’achat d’un manga publié dans la collection Héritage d’Akata (vous pouviez donc prendre une autre série de l’autrice). C’est mon cher libraire qui m’a parlé de l’opération, alors que je prenais le premier tome de Barbara, et qui m’a offert le fameux ex-libris. Quelle beauté ! Merci Akata ! Merci Hagio sensei ! Vous trouverez la photo de l’ex-libris sur le asalitdesmangas.fr, si je pense à faire une photo… Je préfère assurer mes arrières au cas où j’oublie.
Eh bien… je n’ai plus le courage de sortir mon attirail de photographe (allons donc !).
Barbara et les gens du dehors
Barbara l’entre-deux mondes nous plonge dans un univers de science-fiction ou l’exploration des rêves n’a rien de la promenade bucolique. C’est plutôt l’angoisse derrière les sourires, les sourires joyeux ou crispés, et le mystère qui s’épaissit à mesure que WATARAI plonge dans les rêves d’Aoba. Et si son fils Kiriya avait raison ? Et s’il valait mieux ne pas se mêler de cette affaire ?
Car le monde de Barbara fustige le monde de dehors, mais cache lui aussi une violence parfois extrême. Comment tiennent-ils en vie, tous ces gens ? Pourquoi se réunissent-ils autour de… cadavres ? Et Aoba ? Qu’a-t-elle vu, cette nuit d’horreur ? Qu’est-il arrivé à son coeur ? A celui de ses parents ? Qu’a-t-elle fait ? Alors qu’il hésitait à plonger dans cette nouvelle enquête, WATARAI Tokio se souvenait avoir eu du mal à se défaire d’une affaire de meurtres particulièrement cruelle et sanglante. Rentrer dans les cerveaux des gens pour décrypter leurs intentions ne laisse pas indemne. Comment sortira-t-il de l’affaire Barbara ?
L’enquêteur s’empêtre dans les rêves, et aussi dans la réalité. Les inquiétudes de son fils cachent des faits inquiétants. Kiriya n’a pas tout dit. Kiriya a souffert de la séparation d’avec son père. Son père qui part aux 4 coins du monde se planquer dans les rêves des autres alors qu’il ignore ceux de son fils. Son père plus à l’aise avec les inconnus qu’avec son propre fils ? Et il voudrait maintenant retrouver sa fibre paternelle, renouer avec son fils et plaisanter devant un bon déjeuner ? Pour Kiriya, c’est trop tôt ou trop tard. Le rêve de son père est son cauchemar. Kiriya a souvent rêvé en rouge et noir. Du sang, des ténèbres et des larmes. Mieux vaut peut-être fuir et vivre… à Barbara.
Le malaise dans le rêve
Le manga Barbara l’entre-deux mondes déstabilise. Il devient même parfois dérangeant. Il commence presque comme un conte de fées. Mais le ton devient subitement plus grave lorsqu’on redécouvre l’île, mais dans l’enquête de WATARAI. Les moments de joie sont scrutés presque avec suspicion. Ce qu’on croit savoir de la jeune Aoba est aussi un leurre. On ne sait pas tout, et peut-être qu’on ne veut pas savoir. Les gens du dehors dressent un portrait effrayant de la jeune fille, et WATARAI ne sait plus que penser.
On l’a dit : il n’aspirait qu’à de sincères retrouvailles avec son fils. Et voilà son fils, son unique, mêlé à cette histoire paranormale sur fond de meurtre… Rêve, réalité, réalité rêvée, rêve oublié. Dans Barbara l’entre-deux mondes, humains et leurs visions fantasmées croient se mélanger ou se fondent dans un flou pour l’éternité. Mais est-ce seulement possible ? WATARAI Tokio finit toujours par se réveiller. Pourra-t-il simplement soupirer en se rassurant : « ce n’était qu’un rêve… ».
Le point shôjo manga
Barbara l’entre-deux mondes est un shôjo. Je rappelle que les « séparations » shôjo, shônen, josei, seinen ne le sont que pour des raisons éditoriales. En pratique, on voit bien que ces séparations sont poreuses, depuis le début. Hélas, elles ont tout de même provoqué bien des incompréhensions, et des schémas types : l’héroïne passive et amoureuse des shôjo manga, le héros tête brulée des shônen manga. Mais réduire ces deux « courants » à ces clichés est affreusement réducteur.
Depuis le début, HAGIO Moto brise d’ailleurs les frontières et parle de ce qu’elle veut, comme elle veut. On peut voir dans Barbara que l’héroïne n’a rien de ce qu’on entend habituellement par « héroïne de shôjo manga ». Et ces héroïnes n’ont rien d’atypique : il y en a toujours eu et il y en aura encore. Je pense que la classification shôjo/shônen est dépassée. Mieux vaut parler en termes de thèmes abordés : sport, science-fiction, romance, etc.
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Retrouvez Barbara l’entre deux-mondes chez Akata
HAGIO Moto interviewée par Manga-news
Pourquoi lire du Moto HAGIO : l’analyse de Chloé, de la chaîne Complètement shôjo